RECADRER LA MALEDICTION FAMILIALE
Psychogénéalogie

Ce sont généralement les enfants concernés par la répétition traumatique familiale qui se demandent comment faire pour recadrer la malédiction qui les touche. Etes-vous concerné ?

En psychogénéalogie, ce qui est compliqué, c’est que tout se joue au niveau insconscient. Notre histoire familiale conditionne notre vie bien plus que nous ne pouvons l’imaginer.

Anne Ancelin Schüzenberger indique que des psychanalystes ont posé l’hypothèse d’un « refoulement conservateur » et d’une chaîne qui se transmet de génération en génération par un non-dit « s’encryptant dans l’inconscient » de l’enfant désigné par l’arbre.

L’enfant « missionné » est « porteur du secret1  ». Il hérite de ses ancêtres de leurs émotions, leurs traumas refoulés, de secrets honteux « indicibles (qu’on n’a pas le droit de dire) ¹ ».

La patate chaude.
Si, devenu adulte, il ne parvient pas à lever le secret ou n’a pas ni l’idée ni la volonté de le faire, il le transmettra aux générations suivantes. Il se débarrassera ainsi de son «scénario destructeur ²».

« On se repasse la « pomme de terre brûlante »² (the hot potatoe) d’une génération à l’autre pour s’en débarrasser, comme dans un système clos ¹  ».

Le secret familial ? Un véritable casse-tête !
Il est très compliqué d’arrêter la chaîne de répétition.
La personne désignée reçoit l’injonction de porter le secret. Elle a l’interdiction de l’oublier et de le dire en même temps. Cela s’appelle un double nœud gordien (double bind). Nous voilà dans la double contrainte !

C’est diaboliquement impossible et surtout invivable, car, par loyauté invisible envers le clan familial, la personne « missionnée » va obéir à l’injonction et « faire savoir » le secret de façon dissimulée avec une maladie, un échec, un accident, des soucis financiers ou d’autres événements de vie. Certes, elle ne trahira pas sa loyauté, mais aura une vie parsemée d’embuches et sera fragilisée physiquement et psychiquement.

« C’est comme si, quelque part, on n’avait pas le droit de savoir et d’en parler ; et en même temps comme si on n’avait pas le droit d’oublier et que, tout cela, il fallait le faire savoir, mais ne pas le dire explicitement, ni même savoir que l’on sait et que l’on transmet : une double contrainte diaboliquement contraignante (double bind), un double nœud gordien ¹  ».

Anne Ancelin Schützenberger souligne très bien une caractéristique du secret avec la réflexion de Guy Ausloos ³ « il est interdit de savoir et il est interdit de ne pas savoir ».

La double contrainte, c’est-à-dire deux ordres contraires et impossibles à réaliser simultanément implique une mission impossible pour le descendant et une vie bien chaotique en perspective. La seule solution pour lui sera de désobéir et d’affronter la loi du silence qui maintient le secret.

Comment lever le secret familial ?
L’impossible devient possible quand on prend conscience des schémas inconscients que l’on porte. Il est alors possible d’agir sur soi, de modifier ses comportements et ses façons de penser.

Un travail avec un thérapeute s’avère efficace pour identifier les injonctions familiales et les loyautés familiales inconscientes. Ce travail permet de mieux se connaître, d’avoir un nouvel éclairage et de voir les choses sous un autre angle. Pour arrêter la chaîne des répétitions, il est également essentiel de sortir de la position de victime.

Pour donner un exemple concret, lorsqu’une personne a subi de la maltraitance infantile et qu’elle se met en situation d’être maltraitée à nouveau devenue adulte, par le phénomène de revictimisation, elle peut sortir de ce schéma en parlant et en dénonçant ce qu’elle subit et nommer les personnes au comportement abusif. Elle va alors « parler » le secret familial qui lui interdisait de conscientiser et de verbaliser ce qu’elle vivait.

On met des mots sur un non-dit familial par un travail d’introspection et de conscientisation.

L’enfant de remplacement aura de grandes difficultés à exister  dans la famille, car celle-ci doit faire un deuil douloureux. « L’enfant réparateur1″ ressent la tristesse de sa mère in utéro et la présence de son fantôme de frère ou de soeur toute sa vie, tant qu’il ne prendra pas sa place. Parfois, il porte le même nom. Il peut également venir remplacer un proche décédé brutalement. Ou bien, il sera au contraire « l’enfant réparateur¹ », comme Sigmund Freud, qui va apporter de la joie au sein de la famille.

Vincent Van Gogh, Salvador Dali et Sigmund Freud étaient des enfants de remplacement.

Anne Ancelin Schützenberger explique que la personne sort de la fragilisation induite par le statut d’enfant « missionné » en parlant de ses expériences négatives, en leur donnant un sens, en faisant émerger le fil conducteur, en rapprochant les dates, les répétitions. C’est ainsi qu’on « suit le fil rouge des événements, qu’on les cadre ou recadre autrement, quand on parle le secret, qu’on affronte le non-dit ».

« Quand on voit, quand on comprend, le sens émerge, le contexte se transforme, une autre forme émerge du fond, et les choses changent : le sujet respire, se débarrasse du poids du passé, souvent son corps change, sa vie change. Il devient un autre… et (parfois) la guérison vient de surcroit ¹ ».

C’est grâce à votre travail sur vous que vous allez libérer en premier lieu, vous libérer vous-même en premier lieu, mais aussi vos enfants et votre lignée familiale par la suite.

En conscientisant et guérissant vos blessures inconscientes, vous allez arrêter la chaîne de répétition.

Mots clé
Double contrainte
Double nœud gordien
Enfant « missionné »
Guérir ses blessures
Modifier ses comportements
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Parler le secret
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Porter le secret
Recadrer un événement

Sources

¹ Ancelin Schützenberger, A. (2000). Aïe, mes aïeux ! (p151 à 155, p171). Lonrai : Desclée de Brouwer.
² English, F. Citée par Ancelin Schützenberger, A. (2000). Aïe, mes aïeux ! (p171). Lonrai : Desclée de Brouwer.